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Homélie du 2ème Dimanche de Carême


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2ème Dimanche de Carême


«Et, de la nuée, une voix se fit entendre : ‘Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le !’ »


Frères et sœurs,


Le récit de la Transfiguration de Jésus est aussi riche que difficile à comprendre ; en premier lieu parce qu’il s’agit d’une expérience spirituelle, même pourrait-on dire mystique. Je voudrais justement méditer avec vous en ce dimanche à partir de cet épisode sur la prière.

Je vous disais que cet épisode a de très nombreuses significations. Une des premières que je retiens est la révélation de la divinité de Jésus : « Et de la nuée, une voix se fit entendre : ‘Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le !’ » Cet épisode n’est pas sans rappeler celui du baptême de Jésus, où, là-aussi, le Ciel s’était ouvert, et la même Parole, presque mot pour mot, s’était fait entendre. Il est intéressant de noter que la confirmation de la divinité de Jésus est donnée alors que ce dernier prend la route de Jérusalem pour souffrir la Passion. Il y a ici un premier message : ne perdez pas de vue que celui qui va souffrir la Passion, qui va supporter les apparences de l’échec et qui en triomphera est Dieu.

On peut voir également la confirmation de la divinité de Jésus à travers la remarque de Pierre à Jésus : « Faisons trois tentes : une pour toi, une pour Moïse et une pour Élie. » Cette allusion aux tentes laisse à penser que la scène de la Transfiguration se déroule au cours de la fête juive des Tentes, qui est une fête commémorative des Tentes que les Hébreux construisaient dans le désert pendant l’exode pour se protéger. En souvenir de la protection que Dieu leur accordait à travers ces tentes (souvenons-nous que Dieu habitait lui-même une tente, appelée la Tente de la Rencontre), les Hébreux ont gardé cette fête, appelée Soukkôt, qui est aussi devenue une fête de la protection que Dieu accordera aux Hébreux à la fin des temps, où Dieu habitera avec eux. Alors que Jésus monte à Jérusalem pour subir la Passion, sa Transfiguration coïncidant avec la fête des Tentes, nous montre que Dieu habite avec son peuple en Jésus, qui est désormais la Vraie Tente.


L’épisode de la Transfiguration est aussi une expérience de prière. Jésus monte avec Pierre, Jacques et Jean pour prier. Tout ce qui se passe est de l’ordre de la prière.


Il est intéressant de noter les caractéristiques qui définissent la prière. Tout d’abord, la prière transforme ; elle nous divinise. Ou dit autrement, la prière fait apparaître en nous la présence de Dieu : « Pendant que Jésus priait, l’aspect de son visage devint autre et son vêtement devint d’une blancheur éblouissante. » Elle nous affranchit des limites de l’espace et du temps : « Voici que deux hommes s’entretenaient avec lui ; c’étaient Moïse et Élie, apparus dans la gloire. » Elle a pour centre Dieu et non nous-mêmes : « Ils parlaient de son départ qui allait s’accomplir à Jérusalem. » Elle nous permet de voir la gloire de Dieu : « Pierre et ses compagnons étaient accablés de sommeil ; mais, restant éveillés, ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés. » Elle invite à écouter Dieu : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le ! » Au-delà des caractéristiques de la prière, j’en retiens 3 effets.

Durant cette scène, nous voyons que les disciples passent de la contemplation : « Ils virent la gloire de Jésus, et les deux hommes à ses côtés » à l’écoute : « Celui-ci est mon Fils que j’ai choisi, écoutez-Le ! » La prière est à la fois contemplation et écoute ; plus exactement, elle nous fait passer de la contemplation à l’écoute. En ce temps de Carême, regardons si notre prière est une écoute de ce que Dieu nous dit. Notre prière est-elle une recherche de Dieu ? Il arrive parfois que notre prière soit centrée et construite autour de notre personne et qu’elle ne soit ni tournée ni centrée vers Dieu. Attention aux introspections qui nous mettent au centre de notre prière. La véritable connaissance de nous-même découle de ce que Dieu nous révèle, à travers la prière, Lui qui sait qui nous sommes en profondeur.


L’épisode de la Transfiguration nous apprend également que la prière est une participation à l’être et à l’œuvre de Dieu, l’être et le faire étant la même réalité en Dieu. Par conséquent, prier, revient à nous diviniser, à laisser Dieu nous transformer par Lui-même. Sans en avoir saisi tous les sens, Pierre, Jacques et Jean ont aperçu quelque chose de l’être de Dieu et de son œuvre. Lorsque nous-mêmes nous prions, nous nous unissons à l’Être de Dieu et à son œuvre en nous. La prière, la contemplation permet à Dieu d’agir en nous. Si nous ne pouvons pas tous accueillir des Ukrainiens chez nous, si nous ne pouvons pas tous envoyer du nécessaire pour les aider et les soutenir, nous pouvons tous prier pour les victimes, pour les familles, et pour la paix. La prière permet à Dieu d’agir. N’oubliez pas que c’est la force de la prière qui a fait s’écrouler le communisme en Russie dans les années 90.


Enfin, la prière est une véritable œuvre de charité ; elle est le lieu de l’exercice de la charité chrétienne. Dans la prière, on porte et présente à Dieu ceux qui souffrent, ceux qui sont oubliés, délaissés, malades, ceux que l’on a du mal à aimer, ceux qui se battent pour défendre la Vie, le Bien, ceux qui pèchent pour qu’ils se convertissent, ceux qui ne connaissent pas Dieu, etc… La prière est le lieu où l’on peut porter et offrir le monde à Dieu. Elle est aussi le lieu où le Ciel s’ouvre pour éclairer et descendre sur notre terre.


Si l’épisode de la Transfiguration est une expérience spirituelle de prière, elle nous donne aussi les éléments caractéristiques d’une véritable expérience liturgique. Comme pour la prière, la liturgie est d’abord l’œuvre de Dieu en nous, et elle nous fait sortir de nous-mêmes pour vivre autre chose. La liturgie est extatique : on sort de nous pour entrer dans le mystère de Dieu. Il vous est déjà certainement arrivé de vivre une véritable expérience liturgique qui vous fait sortir de vous-mêmes : vous ne savez plus très bien où vous êtes, vous vous sentez bien, comme en dehors du temps, en apesanteur. La paix a envahi tout votre être. C’est comme si, l’espace d’un instant, le Ciel avait envahi notre être. En fait, voilà ce que nous donne à vivre la liturgie. Il faut se laisser porter, surtout ne pas chercher à maîtriser. Dieu nous nourrit plus lorsque nous nous dé-saisissons de nous-mêmes plutôt que lorsque nous cherchons à maîtriser. C’est le génie de la langue latine dans la liturgie romaine qui nous permet de sortir de notre maîtrise. Vous remarquerez que dans le passage d’Évangile du jour, les disciples voient, entendent, ne comprennent pas. Plus tard, ils comprendront. Leurs sens sont sollicités. Eh bien cela doit être la même chose dans la liturgie : nos sens doivent être sollicités. Ce que nous voyons doit être beau, gracieux, harmonieux. Ce que nous entendons aussi, je pense ici particulièrement au chant. Les voix doivent s’unir pour ne faire plus qu’une. Il doit y avoir une recherche d’unité aussi entre les voix et l’orgue. N’ayons pas peur de le dire : il y a quelque chose de sensuel dans la liturgie qui doit nous conduire à Dieu et ouvrir nos êtres à la grâce que Dieu donne. Et au-delà des compétences nécessaires pour que la liturgie soit belle, ce qui fera qu’elle sera source de vie, de beauté, de force, de fécondité, c’est plus que l’estime, c’est l’amour qui unit les uns et les autres, les différents intervenants, les fidèles qui prient, qui fera que la liturgie sera plus que belle et qu’elle accomplira sa fonction d’ouvrir en profondeur nos êtres à Dieu qui se donne.


Saisis par cette scène qu’ils n’ont pas comprise, les disciples descendent en silence et gardent le silence. Le silence est à la fois le signe de l’habitation de Dieu en nous, le signe de sa présence et ce qui nous permet de nous ouvrir à Lui. À nouveau, frères et sœurs, n’ayons pas peur d’habiter le silence de nos liturgies de ce temps de Carême et de le soigner. La Transfiguration consolide la foi des disciples avant l’épreuve de la Passion ; que notre vie de prière, nos liturgies consolident également notre foi sur le chemin de notre exode, en route vers Pâques. Amen !


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