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4ème Dimanche de Carême
« Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. »
Frères et sœurs,
Nous avons dans cet Évangile de St Jean une très belle synthèse du mystère du salut. Il a toujours existé différents courants spirituels dans l’Église, au moins deux très connus : un qui insiste sur le péché de l’homme et donc sur la nécessité du salut offert en Jésus et un autre qui insiste sur l’Amour de Dieu, premier en toute chose, Amour offert en Jésus. En fait, ces deux aspects désignent la même réalité ; seule diffère la manière de dire les choses. Mais avec St Jean nous trouvons les deux réalités très bien expliquées et de manière très juste : « Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. » L’Amour a la première place et le salut offert découle de l’Amour de Dieu pour l’homme. Et, réalité très juste : il revient à l’homme d’accueillir l’Amour de Dieu et le Salut. Dieu ne peut pas se mettre à la place de l’homme.
Chers enfants qui allez vivre votre dernière étape de baptême, chers amis catéchumènes, Dieu vous offre son Amour, son Salut, mais il dépend de vous d’accueillir ce don de Dieu. Si vous ne l’accueillez pas, il ne se passera rien, car Dieu ne fait pas les choses sans nous.
Je voudrais dans un premier temps m’arrêter sur le fait que Dieu nous offre le salut. Le Salut est un don de Dieu ; ce n’est pas nous qui nous sauvons, mais c’est Dieu qui nous sauve. Le christianisme redit très clairement que le salut est offert à tous, sans limites, sans restrictions, sans conditions : les seules exigences qui accompagnent le salut sont celle de l’accueil de ce salut et de la conversion qui en découle. La deuxième lecture que nous avons entendue redit cette réalité de manière très claire : « C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés, et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. » Même si la problématique de St Paul est un peu différente parce qu’il a vécu sous le régime de la Loi dont il se rend compte qu’elle n’a pas la capacité de sauver et qu’il découvre le régime de la grâce qui, elle, sauve, il en arrive au même résultat : c’est Dieu qui sauve et l’homme est appelé à coopérer au salut que Dieu lui offre. C’est ici, Frères et sœurs, que nous avons une différence fondamentale avec le protestantisme. Du côté de l’Église catholique comme du Protestantisme, nous sommes d’accord pour confesser que seul Dieu sauve et que le Salut vient de Dieu et de Dieu seul. Par contre la différence se joue dans la coopération qu’offre l’homme au salut offert en Jésus. Pour les Protestants, la coopération de l’homme est minorée, pour mettre en valeur le salut offert en Jésus ; pour les catholiques la coopération de l’homme est nécessaire pour être sauvé. Là aussi sur cette question Saint-Paul offre une très belle synthèse dans la lecture entendue : « C’est bien par la grâce que vous êtes sauvés. (…) Cela ne vient pas des actes : personne ne peut en tirer orgueil. C’est Dieu qui nous a faits, il nous a créés dans le Christ Jésus, en vue de la réalisation d’œuvres bonnes qu’il a préparées d’avance pour que nous les pratiquions. »
Ceci étant dit, la pointe de la pensée de St Jean réside justement dans la manière dont l’homme accueille ce salut offert par Dieu et surtout dans la manière dont l’homme se place : « Celui qui croit en lui échappe au jugement, celui qui ne croit pas est déjà jugé du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. » En fait la vraie question qui nous est posée ici est celle de notre aptitude à la vérité. Jusqu’où sommes-nous en vérité par rapport à nous-mêmes ? Encore une fois, il ne s’agit pas d’enfermer l’homme dans une vision pessimiste de lui-même, mais il s’agit d’assumer en vérité ses limites, ses pauvretés, son péché, pour accueillir le salut. Ailleurs dans l’Évangile, Jésus dit de manière très simple : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin mais les malades. » La difficulté pour l’homme d’aujourd’hui est de reconnaître son péché au-delà de son orgueil ou de son aveuglement. Le regard de Dieu sur l’homme pécheur est profondément bon, guérissant, libérateur, jamais jugeant ou condamnant.
Frères et sœurs, gardons bien cela dans notre cœur en ce temps de conversion qu’est le carême où nous sommes invités à aller nous confesser avant la fête de Pâques. Le sacrement de la réconciliation est l’occasion d’un profond renouveau et d’une profonde guérison, pas le lieu d’une humiliation ou d’une dégradation.
Pour terminer, je voudrais, à la lumière de la première lecture, vous inviter à relire votre vie qui est aussi le lieu de multiples saluts déjà opérés par Jésus. En effet la première lecture nous offre une relecture croyante, juive, d’une partie de l’histoire du Peuple d’Israël. Les péchés du Peuple juif ainsi que les refus de se convertir ont entrainé la destruction du Temple et de la Ville de Jérusalem ainsi que la déportation du Peuple à Babylone. Puis, la conversion du Peuple, a permis, par l’intermédiaire du Roi Perse Cyrus, le retour du Peuple en Israël. Cette lecture nous montre que Dieu agit dans l’histoire ; elle nous montre qu’au travers des événements qui font notre vie Dieu nous parle, nous lance des appels, en quelque sorte qu’Il nous guide. Mais ces appels au salut, à la conversion qu’a reçus le Peuple Hébreu, nous en recevons de même dans notre vie.
Frères et Sœurs, cela est l’occasion pour nous en ce temps de Carême de relire notre vie de manière spirituelle et plus particulièrement, de porter notre attention sur les épreuves vécues ainsi que sur les grâces obtenues. Quels étaient les appels à la conversion derrière ? ont-ils été entendus ? Y avons-nous répondu ? Quelle fécondité avons-nous reçu de ces épreuves ? Comment Dieu nous a fait grandir ? Voici des questions qui peuvent nourrir la relecture spirituelle de notre vie, notre prière, en ce temps de Carême. Cherchons-y l’œuvre du salut de Dieu en nous et dans nos vies pour nous ouvrir au Salut total et définitif qu’Il veut nous offrir en Jésus. Amen !
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