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32ème Dimanche du Temps ordinaire
« Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du Trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. »
Frères et sœurs,
Jésus voit le fond des cœurs quand nous, hommes, n’en restons bien souvent qu’aux apparences et à la superficie. L’Évangile que nous venons d’entendre nous le redit : Jésus voit le fond de la démarche d’offrande de la veuve. Avant de regarder comment l’Évangile rapporte l’offrande de la veuve, regardons le début de l’Évangile qui rapporte l’enseignement de Jésus : « Méfiez-vous des scribes, qui tiennent à se promener en vêtements d’apparat et qui aiment les salutations sur les places publiques, les sièges d’honneur dans les synagogues, et les places d’honneur dans les dîners. Ils dévorent les biens des veuves et, pour l’apparence, ils font de longues prières : ils seront d’autant plus sévèrement jugés. »
Nous sommes habitués dans l’Évangile à ces sortes de mise en garde de Jésus : contre les scribes, les Pharisiens, les docteurs de la Loi ; nous sommes habitués aux appels à l’intériorité et à la mise en garde contre la superficialité et la mondanité qui sont des freins à l’unité profonde de notre être. Aujourd’hui nous réentendons cet appel à aller au cœur de notre relation à Dieu, mettant de côté tout ce qui concerne le regard des autres, ce que l’on va penser de moi si ceci, si cela…bref, Jésus nous appelle à être vraiment libres intérieurement, seul face à Dieu, en conscience, tels que nous le rencontrerons au terme de notre vie. Frères et sœurs, le regard des autres, le poids des relations, aujourd’hui disons des réseaux, la mondanité, les influences, entravent bien souvent la liberté intérieure de notre relation à Dieu et les actes que nous sommes appelés à poser dans notre vie, et cela même en paroisse. Combien d’engagements sont pris, ou pas pris, parce que telle personne y est et que donc, c’est bien si j’y vais moi aussi… et il y a l’inverse…par exemple arrêter de venir à la messe à la collégiale, parce que cela ne passe pas dans mon réseau mondain! Jésus nous invite à nous défaire de tout cela pour être simple, libres et aller à l’essentiel. La collecte de la messe nous invite à prier en ce sens : « Dieu de puissance et de miséricorde, éloigne de nous, dans ta bonté, tout ce qui nous arrête, afin que sans aucune entrave, ni d’esprit ni le corps, nous accomplissions d'un cœur libre ce qui vient de toi. »
La liberté intérieure est ce qui détermine le degré de notre vérité dans notre relation à Dieu, et aux autres. Il faut en prendre soin, la faire grandir, et parfois, la protéger.
Venons-en maintenant à l’offrande de la veuve. On comprend toute de suite que la pointe de la réflexion de Jésus n’est pas sur la quantité d’argent qui sera donnée, mais sur l’intention profonde qui conduit à donner. D’ailleurs, Saint Marc nous dit bien que Jésus regardait comment la foule mettait de l’argent, et non combien la foule mettait d’argent. La question qui nous est donc posée est celle-ci : comment est-ce que je donne ? Rappelons-nous d’abord que, quels que soient nos biens, notre propriété, notre richesse, dans le fond, nous ne sommes propriétaires de rien : nous ne partirons avec rien. Seul Dieu est maître de tout et propriétaire de tout ; nous ne sommes que dépositaires. Les prières de l’offertoire nous redisent justement cette réalité ; tout ce que nous avons vient de Dieu : « Tu es béni, Seigneur, Dieu de l’univers : nous avons reçu de ta bonté le pain que nous te présentons, fruit de la terre et du travail des hommes ; il deviendra pour nous le pain de la vie . »
Ensuite, Dieu ne nous demande pas d’abord de Lui donner des biens, mais de Lui donner notre Amour. C’est ce que nous montre d’une certaine manière la première lecture. En obéissant au Prophète Élie, la veuve fait l’expérience que Dieu seul donne la fécondité et les biens d’une manière surnaturelle. La valeur de nos offrandes ne réside pas dans la quantité, mais dans l’amour qui les porte. Tout comme la prière d’ailleurs. La beauté d’une prière ne réside pas dans la durée de cette dernière, mais dans l’amour que nous y mettons ou que nous n’y mettons pas. Tout au long de notre vie, Frères et sœurs, nous ne pouvons que grandir dans l’amour qui porte nos dons, grâce à Jésus en qui l’Amour et le don se rejoignent pour ne faire plus qu’un. À nouveau, c’est dans la communion avec Jésus, communion eucharistique, dans l’Adoration eucharistique, que nous pouvons grandir nous aussi et dans l’amour et dans le don.
Il y aurait une réflexion à mener pour nous tous sur la manière dont nous nous donnons et sur ce que nous donnons. Heureusement, l’Église est riche de ses membres différents qui se donnent en des lieux différents et de manière différente. Il est vrai que nous sommes appelés à donner, tellement de nouvelles formes de pauvreté sont aujourd’hui présentes. Nous aurons toujours des choses à faire et il faut les faire. Mais il me revient l’histoire de Marthe et Marie : l’une qui s’affaire ; l’autre qui est présente aux pieds de Jésus…et Jésus qui répond à Marthe : « Tu t’agites pour bien des choses ; une seule est nécessaire. Marie a choisi la meilleure part ; elle ne lui sera pas enlevée. » Il y a un don aujourd’hui qui est coûteux, et parfois plus dur que d’autres activités, c’est donner de son temps à Dieu pour Dieu, comme Marie dans l’Évangile; perdre du temps pour Dieu. Mais ce que Jésus nous apprend à travers l’Évangile, c’est que, c’est en donnant de son temps à Dieu, qu’on se laisse transformer par Lui pour devenir comme Lui. Le temps donné à Dieu, même s’il nous apparait comme perdu, ne l’est jamais en vérité.
Je reviens sur terre avec l’offrande de la veuve. Il est un thème dont on ne parle pas beaucoup dans l’Église, mais qui pourtant est présent : c’est celui de l’argent et plus particulièrement des finances. Une fois n’est pas coutume, permettez-moi de vous en toucher deux mots. Vous savez que depuis la séparation de l’Église et de l’État, l’Église ne reçoit aucun financement de l’État. L’Église, par conséquent, ne vit que du don des fidèles. Et j’en profite pour vous rappeler ce que précise le droit canon sur les obligations des fidèles baptisés par rapport à l’Église : « Les fidèles sont tenus par l’obligation de subvenir aux besoins de l’Église afin qu’elle dispose de ce qui est nécessaire au culte divin, aux œuvres d’apostolat et de charité et à l’honnête subsistance de ses ministres. » Canon 222, 1.
Les dons des fidèles sont de plusieurs sortes : il y a bien sûr les quêtes, le denier du culte, les dons que tel ou tel peut faire, les offrandes de messes, les casuels. Voici les ressources financières de l’Église. Un mot sur chacune.
Les quêtes restent, en règle générale, aux paroisses et servent à couvrir tous les frais incombant à la paroisse : électricité, chauffage, fournitures de culte, de secrétariat, entretien des bâtiments etc… Les quêtes dites « impérées » sont ponctionnées à raison de 80 pr cent par le diocèse pour telle ou telle cause. Les 20/100 autres restent à la Paroisse. Par exemple, pour ce mois de novembre, il y aura deux quêtes impérées : les 9 et 10 Novembre pour le denier de St Pierre (qui sert au Pape pour aider qui il veut : église, pays, structure, personnes etc…) et les 16 et 17 Novembre pour le Secours Catholique. Les quêtes des baptêmes et mariages restent en paroisse ; les quêtes d’obsèques aussi, avec la particularité que la moitié de la quête est comptée en offrande de messes pour le défunt.
Le denier du culte, aujourd’hui appelé dernier de l’Église, est ce qui sert à payer le traitement des prêtres (c’est-à-dire le salaire) ainsi que le salaire des laïcs travaillant au diocèse ; il sert également à payer les charges diocésaines. Vous savez qu’il y a une véritable problématique car le nombre de donateurs ne cesse de diminuer de manière générale, parce que beaucoup retournent vers le Père, et que les nouvelles générations ne sont pas forcément habituées à donner. Le denier du culte part au diocèse qui centralise les dons et harmonise les traitements des prêtres. J’en profite pour vous rappeler que si les fidèles ont évidemment toute latitude pour soutenir les communautés qu’ils souhaitent dans l’Église (je pense plus particulièrement à la communauté Saint-Martin ou à la Fraternité Saint-Pierre ici présente sur notre paroisse), il n’en demeure pas moins que ces communautés sont accueillies dans des paroisses diocésaines qui en assument les charges. Il me semble par conséquent juste de s’en souvenir par rapport aux dons qui sont faits.
Les dons personnels que vous pouvez faire sont redistribués selon vos souhaits. Vous avez l’habitude de la collecte de Carême où vous donnez pour telle ou telle association ou projet. Vous pouvez bien sûr faire des dons à la paroisse pour tel ou tel projet. Si vous souhaitez recevoir un reçu fiscal pour un don à la paroisse, c’est toujours possible : il faut vous adresser directement à notre comptable Julio Afonso.
Les offrandes de messes restent aux paroisses : elles servent pour une part aux charges paroissiales ainsi que pour une autre au traitement des prêtres (le denier du culte ne couvrant pas tout…) Enfin, les casuels sont des offrandes faites à l’occasion d’une demande de service à l’Église, pour un baptême, un mariage, des obsèques… Les casuels restent aux paroisses. Là aussi des questions se posent pour l’avenir : aujourd’hui pas mal de paroisses arrivent à tenir la tête hors de l’eau grâce aux obsèques. Mais l’Église de France sait bien que c’est aussi une question de temps, parce que c’est une question liée aux générations, et d’ailleurs, je peux vous dire que nous constatons ces derniers mois de manière générale une diminution des obsèques religieuses en France.
Je suis désolé si j’ai été un peu trop dans le détail, mais je pense que tout le monde ne sait pas comment fonctionne les ressources financières dans l’Église, et il arrive que l’on entende des inepties, telles que l’argent des quêtes va directement dans la poche des prêtres !
Frères et sœurs, je reviens à la question essentielle qui nous est posée aujourd’hui : comment est-ce que je donne ? et comment est-ce que je me donne ? Que notre Communion à Jésus nous fasse grandir dans le don de nous-même à Dieu et aux autres. Amen !
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