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32ème Dimanche du temps ordinaire
Frères et sœurs,
En cette fin de cycle liturgique, nous abordons la question de la fin des temps, de la vie éternelle, de la vie en Dieu et des relations que nous aurons au Ciel les uns avec les autres. Je profiterai de ce thème pour aborder un point bien mystérieux qui est celui de la Résurrection de la chair.
La question ironique des Saduccéens tend à ridiculiser la perspective de la Résurrection. Cette pauvre veuve qui a eu 7 maris, de qui sera-t-elle l’épouse au Ciel ? Jésus répond que les relations au Ciel ne sont pas à penser à partir de celles que nous avons ici-bas sur terre. Nous touchons ici un premier point important qui concernent les réalités divines. Il ne faut pas penser le Ciel, les réalités divines, la vie éternelle à partir de nos réalités terrestres. Il faut accepter de recevoir quelque chose de nouveau et il faut accepter de se laisser former, instruire. Du reste, je crois que si aussi peu de nos contemporains, même de culture chrétienne, ne croient pas en la vie éternelle, c’est bien parce qu’ils pensent la vie éternelle à partir de leur vie humaine…et l’on peut comprendre que si la vie éternelle est comme celle que nous avons là, avec le mal, la souffrance, l’injustice, la mort, on n’est pas trop envie de la continuer…
Dans le prolongement de la fête de la Toussaint et du mystère de la Communion des saints que nous avons célébrés, nous redisons que lorsque nous mourrons, nous allons vers une communion profonde avec Dieu, où finalement Dieu devient Tout en nous. Et parce que Dieu devient Tout en nous, parce que nous sommes en quelque sorte divinisés, nos relations deviennent entièrement nouvelles, marquées par Dieu qui nous unit en Lui les uns aux autres. Par conséquent, les liens qui ont existé ici-bas ne sont pas abolis là-haut, mais reçoivent une nouvelle plénitude et une nouvelle dimension. Voilà pourquoi Jésus dit que le mariage caractérise notre vie terrestre et que « ceux qui ont été jugés dignes d’avoir part au monde à venir et à la Résurrection d’entre les morts ne prennent ni femme ni mari (…) ils ne peuvent plus mourir ; ils sont semblables aux anges, ils sont enfants de Dieu et enfants de la Résurrection. »
Quand on comprend ce mode de relation que nous connaitrons là-haut, on comprend dès lors le fondement et le sens du célibat consacré, qu’il soit celui des religieux ou des religieuses ou bien celui des prêtres.
Le célibat consacré des religieux porte en lui-même une signification eschatologique : il est le signe du mode de relations que nous connaîtrons au Ciel, et il devient par conséquent le signe concret, tangible de l’existence de Dieu. C’est en vue de ce mode de relations que nous connaitrons en Dieu et par Dieu que des hommes, des femmes acceptent d’en être le signe par anticipation et acceptent de vivre de cette fécondité divine dans une consécration particulière.
Le célibat consacré des prêtres comporte aussi cette signification, mais il faut ajouter le sens d’un mariage non pas avec une personne particulière, mais avec une partie du peuple de Dieu. Si dans l’Église catholique romaine le prêtre ne se marie pas, c’est parce qu’il épouse un peuple auquel il se donne. Là aussi, le célibat consacré des prêtres est le signe concret, tangible de l’existence de Dieu.
Par conséquent, attaquer le célibat consacré, qu’il soit celui des religieux ou des prêtres, revient à remettre en cause les signes concrets de l’existence de Dieu. Je ne reviens pas sur les remarques stupides que l’on entend dans le monde, parfois malheureusement dans l’Église, sur les déséquilibres liés au célibat ou sur la pénurie de vocation…j’en ai déjà parlé à plusieurs reprises. Au sujet des vocations, il n’y a qu’à regarder chez les protestants chez qui les pasteurs peuvent se marier…ils ont exactement le même problème de vocation que dans l’Eglise catholique…Le plus important est que vous, fidèles, vous estimiez le célibat consacré, que le défendiez et que vous en viviez ! Puissiez-vous vivre du ministère des prêtres, de leur paternité spirituelle, puissiez-vous vivre de la grâce des sacrements. Puissiez-vous apprendre aussi à vos enfants, à vos familles à estimer les prêtres plutôt que de les critiquer... Vous savez, là où le sacerdoce est estimé, là où les paroisses vivent du ministère des prêtres, les vocations fleurissent…Le célibat consacré est un véritable don fait à l’Eglise, alors un don certes fragile, attaqué, mais qu’il faut soutenir et défendre. Et puis, il ne faut pas oublier que l’ordination d’hommes mariés, que l’Eglise a connue pendant quelques siècles, a été à ce point source de problèmes, que l’Eglise latine a choisi d’y renoncer.
Pour terminer, je souhaiterais aborder la question de la Résurrection et la question délicate de la Résurrection de la chair. La foi en la Résurrection s’est construite progressivement dans le temps avant même d’arriver à la Résurrection de Jésus. Il y a d’abord l’épisode du Buisson ardent que reprend Jésus avec cette révélation à Moïse du nom de Dieu : « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». Puis, la première lecture nous donne à voir l’émergence de la foi en la Résurrection au 2ème siècle avant Jésus-Christ dans le Judaïsme sous la persécution du Roi Antiochus IV. Enfin, en ressuscitant Lazare, Jésus prépare ses contemporains à sa propre Résurrection. La Résurrection de Jésus pose le problème de la corporéité du Ressuscité. Jésus a un corps que l’on peut toucher, dans lequel on peut voir la trace des clous ; il mange devant ses Apôtres, mais son corps n’est plus soumis aux règles régissant notre temporalité. Jésus est présent d’un seul coup et il disparait d’un seul coup. Tout cela est bien mystérieux, mais il faut se garder de penser la corporéité de la Résurrection à partir de nos critères, comme je le disais au début. Mais c’est la Résurrection de Jésus qui a vécu en tout point notre humanité qui nous permet d’affirmer que nous ressusciterons nous aussi avec un corps. A cela, nous pouvons ajouter que la mort, issue du péché originel, du diable, introduit une division dans l’être : l’âme se sépare du corps ; si la victoire, manifestée dans la Résurrection de Jésus, appartient à Dieu, alors elle est œuvre d’une unité nouvelle ; cela implique donc que l’âme immortelle retrouve à un moment donné un corps. Saint Paul parlera de ce corps comme un corps glorieux, marqué par la gloire de Dieu.
Que ces textes nous aident à approfondir notre foi en notre future Résurrection et puissions-nous préparer notre entrée dans l’éternité en vivant de manière plus sainte chacune de nos relations ici-bas. Amen !
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