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28ème Dimanche du Temps ordinaire
« L’un d’eux, voyant qu’il était guéri, revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix. »
Frères et sœurs,
Je vous propose d’entrer dans la méditation de cet Évangile par la porte de la foi qui fait demander aux 10 lépreux la guérison à Jésus. C’est la foi en cet homme dont on entend parler qui les fait aller jusqu’à Lui, transgresser la règle de se tenir à l’écart, en raison de l’impureté due à la lèpre et du risque de contagion, et venir lui présenter leur demande. La foi qui les anime abolit la distance légale et leur permet d’accéder à Jésus. Elle permet de rencontrer Dieu. Une première question se pose à nous aujourd’hui. Il arrive bien souvent que nous recherchions Dieu, Jésus. Savons-nous que nous pouvons accéder à Lui par la foi ? Où que nous soyons. De ce fait, quand je prie, quand je me dispose à rencontrer Dieu, est-ce que je sollicite ma foi pour me redire que la foi me permet, malgré mes pauvretés, mon péché, mes reniements ou mes infidélités, d’accéder à Jésus dans toutes les circonstances ?
Cette rencontre de Dieu nous est signifiée dans l’Évangile par un changement de vocabulaire. Au début, les lépreux s’adressent à Jésus en L’appelant « Maître ». Ils le voient comme un Rabbi, un enseignant. À la fin de l’épisode, l’évangéliste nous dit que le seul lépreux qui revient à Jésus vient pour « rendre gloire à Dieu » et St Luc d’ajouter : « Il se jeta face contre terre aux pieds de Jésus ». C’est une attitude d’adoration. Le lépreux qui revient voir Jésus confesse par son intention et par son attitude qu’il a rencontré Dieu. Sa foi lui a permis de passer du « Maître » au « Seigneur ».
Enfin, dernière chose que nous pouvons relever par rapport à la foi, c’est que la foi permet de faire confiance à Jésus et d’obéir à ce que Jésus dira, et c’est dans cette attitude d’obéissance et de confiance que la guérison aura lieu. C’est le même principe qui prévaut dans le récit de la pêche miraculeuse où les disciples, malgré une nuit passée sans rien prendre, vont accepter, sur la parole de Jésus, de repartir et de jeter leurs filets sur la droite. La confiance et l’obéissance à la Parole de Jésus permet à Dieu d’agir. Nous pouvons pour notre part nous interroger sur notre propre confiance et notre propre obéissance à Jésus, surtout lorsque ce que nous recevons ne va pas dans le sens de ce que nous pensons ou de ce que nous désirons.
Ce récit évangélique nous présente une autre particularité : c’est que le miracle opéré par Jésus ne va pas avoir lieu de manière directe - nous ne voyons pas Jésus toucher les lépreux - mais il va avoir lieu de manière indirecte. Jésus renvoie à la Loi, Il renvoie les lépreux à ce qu’ils doivent faire en cas de maladie : aller se montrer au prêtre ; et d’ailleurs Jésus se conforme Lui-même à la Loi en l’appliquant et en s’y sous-mettant. Il ne se place pas au-dessus de la Loi. Mais vous remarquerez qu’alors qu’Il renvoie à la Loi en l’appliquant, la guérison qui s’effectue en cours de route souligne de manière discrète et délicate la supériorité de Jésus sur la Loi.
Ce miracle nous redit, alors que bien souvent nous recherchons Dieu dans le spectaculaire, dans l’extraordinaire, que Dieu se donne et agit dans l’ordinaire des choses. Il nous arrive un problème, une épreuve ; on cherche Dieu et on attend une manifestation ou une réponse visible, un fait important, quelque chose qui s’impose à nous…mais Dieu agit et répond d’abord dans l’ordinaire de nos vies. Alors soignons nos devoirs d’état, ce que nous devons faire, notre vie de prière, nos engagements, notre vie de paroisse, vivons tout cela avec le plus d’amour possible, le plus saintement possible, le plus simplement possible…et Dieu se donnera à nous tout aussi simplement, Il nous redira sa tranquille et discrète présence. C’est la même chose en liturgie. Aujourd’hui, pour redonner le goût de Dieu, on a parfois le désir de créer de grands évènements, avec des chants et des musiques qui vont faire sensation. Cela peut faire du bien aux personnes, je ne le lie pas. Mais c’est à distinguer de la manière dont Dieu se donne. Dieu ne se donne pas plus, ne répond pas plus à l’homme dans des manifestations grandioses. Le don de Dieu n’est pas dépendant des évènements humains. Au contraire, Dieu se manifeste comme au temps du prophète Élie, dans ce qui est simple, humble, ordinaire, discret.
La première lecture qui nous rapporte la guérison du général syrien Naaman et qui annonce celle des lépreux de l’Évangile, nous montre par ces 7 plongées dans l’eau du Jourdain une image du baptême qui nous purifie de la lèpre du péché. Il y a pour nous ici une invitation à vivre simplement et pleinement de la grâce du baptême que nous avons reçue, ne cherchant pas à faire des choses formidables et exceptionnelles, mais cherchant à vivre le plus parfaitement possible toutes les plus petites choses de notre vie baptismale. Ne recherchons pas le sensationnel, l’extraordinaire, qui peuvent nous détourner de Dieu, mais cherchons à vivre le plus saintement possible nos devoirs d’état, nos plus petits engagements. Là se révèle de manière ordinaire la manifestation de Dieu.
Enfin cet Évangile nous interroge sur notre propre prière d’action de grâce. Un seul lépreux sur les 10 vient remercier Jésus. C’est bien peu. Un seul prend le temps, alors qu’il a eu ce qu’il souhaitait, de revenir voir Jésus pour Le remercier. La prière d’action de grâce offre l’avantage de nous décentrer de nous pour nous tourner vers Dieu, source de tout don. En ce sens, c’est une prière qui nous ajuste à Dieu et nous ouvre à ce qu’Il fait pour nous, dans notre vie. La prière d’action de grâce nous rend coopérateurs de l’œuvre de Dieu. On ne coopère pas d’abord à l’œuvre de Dieu en demandant des choses à Dieu, en faisant des choses pour Dieu, mais en Lui rendant grâce pour ce qu’Il fait. C’est Lui qui est la source et qui a l’initiative. C’est à son œuvre que nous sommes appelés à travailler, non à la nôtre. L’action de grâce parfait notre relation à Dieu ; elle l’accomplit.
Frères et sœurs, nous savons que la prière d’action de grâce parfaite se trouve dans la messe, autrement appelée l’Eucharistie qui signifie en grec l’action de grâce. La messe, l’Eucharistie, est l’action de grâce de Jésus qui s’offre à nouveau à son Père, par les mains du prêtre, pour sanctifier et accomplir l’Alliance qu’Il est venu parfaire avec nous les hommes pour notre salut. Nous devons nous interroger sur la place de notre prière d’action de grâce au cours même de la messe. Est-ce que nous unissons notre propre action de grâce à celle de Jésus qui s’offre à son Père ? Et pour être plus complet sur cette question, nous retrouvons les 3 étapes de la rencontre des lépreux avec Jésus dans la messe. Les lépreux demandent à Jésus de prendre pitié d’eux : « Jésus, Maître, prends pitié de nous ! » lui cirent-ils. Puis Jésus va les guérir : la grâce de la guérison va agir alors que les lépreux se conforment à la Loi. Enfin, un lépreux vient rendre grâce à Jésus. Dans la messe, nous commençons par demander à Dieu qu’Il prenne pitié de nous dans le rite pénitentiel; puis nous recevons Jésus qui se donne, sous le Pain eucharistique, et enfin, nous rendons grâce à Dieu pour son don et son œuvre. Nous aurons une réelle prière d’action de grâce unie à celle de Jésus, si nous vivrons la messe de manière féconde, c’est-à-dire si nous avons réellement demander pardon au Seigneur, pour l’accueillir dans le Pain eucharistique et que nous prenons le temps de rester avec Lui après la Communion. Il est juste de rendre grâce à Dieu dans notre prière ; mais il est encore plus juste de nourrir notre participation à la messe par nos propres actions de grâce que nous unissons à celle de Jésus. Là se trouve la vraie participation active des fidèles à la messe demandée par le Concile Vatican II.
Frères et sœurs, puisse la méditation de cet épisode d’Évangile si bien connu de chacun de nous nous aider à faire de notre vie de baptisés une action de grâce à Dieu. Amen !
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