Homélie du 2è Dimanche de Pâques

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Dimanche de l’Octave de Pâques

 « Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom. »

Frères et Sœurs,

Les différents Évangiles que nous méditons dans ce temps de Pâques abordent deux questions relatives à la nature de la Résurrection ; il y a la question de la coporéité de Jésus Ressuscité : quelle est la consistance, la nature du corps de Jésus ressuscité ainsi que ses propriétés? et il y a la question des différents modes de présence de Jésus Ressuscité.

La question de la coporéité du Ressuscité est abordée dans l’Évangile du jour ; pour vérifier que Jésus est bien ressuscité, Thomas veut toucher la marque des clous laissés par la crucifixion. Jésus a donc un corps ; d’ailleurs, nous le verrons dans les Évangiles de la Résurrection, Jésus va manger du poisson pour bien montrer qu’il a un corps et qu’il n’est pas un fantôme. Mais la question porte plus sur la coporéité du Corps ressuscité de Jésus ; parce que Jésus peut apparaître comme cela et disparaître, sans passer par la porte ; il peut apparaître à plusieurs personnes en même temps. En fait, Jésus Ressuscité n’est plus soumis aux limites de l’espace et du temps.

La deuxième question abordée par les Évangiles de la Résurrection porte sur les différents modes de présence de Jésus. En fait Jésus Ressuscité va ouvrir ses Apôtres et ses disciples à ses différents et nouveaux modes de présence. Comme l’Évangile nous le rapporte, Jésus se rend présent lorsque deux ou trois sont réunis en son Nom. Le Ressuscité est encore présent dans les Écritures comme nous le révèle l’Évangile des Pèlerins d’Emmaüs. Mais Jésus est encore présent, et il L’est au plus haut point, sous les espèces eucharistiques que sont le Pain et le Vin lors de la messe. Lorsque Jésus est présent quand deux ou trois sont réunis en son Nom, Il est présent spirituellement ; lorsqu’Il est présent dans les Écritures, Il est présent spirituellement ; lorsqu’Il est présent à la messe dans les espèces eucharistiques, Il est présent spirituellement et corporellement ; c’est le mode de présence de Jésus Ressuscité le plus complet et le plus parfait.

Pour autant, les textes que nous entendons aujourd’hui nous montrent une autre réalité : ils nous montrent l’Église qui commence à fonctionner et à agir au Nom de Jésus Ressuscité. Voici ce que dit Saint-Jean : « Ayant ainsi parlé, Il souffla sur eux et il leur dit : ‘Recevez l’Esprit-Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus’ ». J’ai déjà eu à plusieurs reprises l’occasion de commenter ce don de l’Esprit-Saint rapporté chez St Jean au jour même de la Résurrection. Cette fois-ci, je voudrais attirer votre attention sur le fait, qu’avant même que l’Église accomplisse sa mission d’annoncer Jésus et la Résurrection, elle a d’abord reçu l’Esprit-Saint. Dans les paroles qui suivent le don de l’Esprit-Saint, Jésus transmet à son Église le pouvoir de remettre les péchés. Nous y voyons la transmission du pouvoir sacramentel que Jésus fait à son Église.

Mais il y a aussi avec le don de l’Esprit Saint à l’Église, la mission confiée aux Apôtres de transmettre la bonne nouvelle de la Résurrection. C’est effectivement ce que nous rapporte le passage d’Évangile du jour. Nous avons l’habitude de voir que Thomas a des doutes, que Thomas veut des preuves pour croire. Tout cela est juste. Mais il est aussi juste de remarquer que Thomas n’accepte pas d’accueillir le témoignage de ses frères apôtres tant que lui-même n’a pas fait l’expérience du Ressuscité. Il refuse en quelque sorte le témoignage apostolique. Or nous-mêmes, qui croyons en la Résurrection de Jésus, nous y croyons parce que nous avons accepté d’accueillir le témoignage de foi qui vient des Apôtres. Nous nous trouvons dans cette Béatitudes de Jésus : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu ». Mais Thomas ne se situe pas comme cela. Comme le rappelleront les Actes des Apôtres au moment du remplacement de Judas et de l’élection de Matthias, le témoignage apostolique repose sur ceux qui ont été choisis et appelés par Jésus, qui ont vécu avec Lui, qui ont vécu le mystère de sa mort et de sa Résurrection, une place particulière étant réservée pour Saul de Tarse qui deviendra St Paul, qui n’était pas là physiquement au moment de la Passion et de la Résurrection. C’est en vue de cette mission de la transmission du témoignage des Apôtres que l’Église reçoit l’assistance de l’Esprit-Saint.

Je me concentre en priorité sur la question de la transmission du témoignage apostolique, mais je peux étendre la mission de l’assistance de l’Esprit-Saint à l’Église pour tout ce que l’Église enseigne. C’est ce qui concerne sa dimension magistérielle. L’Église enseigne parce qu’elle a le secours et l’assistance de l’Esprit-Saint qui est donné au collège des 12 Apôtres pour cela. C’est à ce titre là que les évêques, successeurs des Apôtres, sont tous docteurs de la foi dans leur diocèse.

Au passage Frères et Sœurs, je voudrais vous faire remarquer que l’on a souvent dit que Jésus répond aux doutes que les uns et les autres ont. L’Écriture nous montre qu’Il le fait lorsque son cousin Jean Baptiste est emprisonné, à quelques heures de sa mort, et qu’il se demande s’il a vraiment réussi sa mission ou s’il en est passé à côté. Il le fait encore pour Thomas qui veut vérifier que cet homme apparu est bien Jésus ressuscité. Mais on peut également lire cette scène comme le fait que Jésus ne répond pas simplement aux doutes que nous avons, mais qu’Il comble nos attentes les plus profondes.

Avec l’Église qui reçoit l’assistance de l’Esprit-Saint pour transmettre la Bonne Nouvelle de la Résurrection et affermir le témoignage apostolique, l’Église commence sa mission. Nous avons l’habitude de dire que l’Église n’entre en mission qu’au moment de la Pentecôte où elle a reçu l’Esprit-Saint. Mais comme je vous le faisais remarquer, le don de l’Esprit-Saint chez Saint Jean n’est pas rapporté 50 jours après la Résurrection de Jésus mais le soir même de la Résurrection. Saint-Jean montre ainsi que le don de l’Esprit-Saint à l’Église et la résurrection constituent un seul et même mystère. Je voudrais donc pour terminer vous souligner quelques aspects de cette entrée en fonction ou en mission de l’Église qui sont présents dans les textes que nous avons entendus aujourd’hui.

Tout d’abord, la première lecture évoque un certain nombre de miracles et de prodiges accomplis par les Apôtres et plus particulièrement par Pierre. Nous sommes passés d’un mode d’action de Jésus qui touchait lui-même les malades par un lien direct à maintenant un mode d’action et de guérison, qui ne passe plus par Jésus, mais qui passe par l’Église qui en a reçu la mission de Jésus et le pouvoir par l’Esprit-Saint. Le temps pascal correspond aussi pour les Apôtres à l’appropriation progressive de leur mission qui est maintenant d’agir au nom de Jésus. St Luc à la fin de la lecture nous montre que c’est exactement la même réalité que du temps de Jésus : « La foule accourait aussi des villes voisines de Jérusalem, en amenant des gens malades ou tourmentés par des esprits impurs. Et tous étaient guéris. »

L’Église commence également sa mission, sous la conduite de Jésus Ressuscité et avec l’assistance de l’Esprit-Saint, en mettant par écrit ce que l’Esprit de Dieu veut dire à son peuple. Je reprends à ce titre un passage de l’Apocalypse de Saint-Jean entendu en deuxième lecture : « Je fus saisi en esprit le jour du Seigneur et j’entendais derrière moi une voix forte qui disait : ‘Ce que tu vois, écris-le dans un livre et envoie-le aux sept églises’ ». L’Église reçoit la mission de transmettre aux communautés chrétiennes et aux toutes jeunes églises ce que l’Esprit de Dieu veut leur révéler. Elle devient donc dépositaire et responsable des Écritures inspirées par Dieu et transmises à son peuple.

Frères et Sœurs, en ces jours où nous sommes davantage sensibles à la question de l’apostolicité de l’Église puisque les cardinaux vont choisir le nouvel évêque de Rome qui deviendra Pape, prions pour que l’Église, profitant des grâces du temps pascal, soit toujours plus à l’écoute de l’Esprit-Saint et soit toujours plus fidèle à Jésus Ressuscité qui agit dans son Église pour que l’homme choisi pour succéder à Saint-Pierre soit celui que Dieu veut donner à son Église. Amen !