Homélie de le Nativité de Saint Jean-Baptiste
- Paroisse Saint Louis
- 25 juin
- 6 min de lecture

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Nativité de Saint Jean-Baptiste
« J’étais encore dans les entrailles de ma mère quand il a prononcé mon nom. »
Frères et Sœurs,
Les textes choisis pour la solennité de la Nativité de Saint Jean-Baptiste mettent l’accent sur la vie in utero. Ceci est particulièrement important parce que la Bible, l’Écriture Sainte, nous montre que le bébé dans le ventre de sa mère est une réelle personne, déjà aimée par Dieu, habitée par Dieu et déjà agissante. Voyez-vous aujourd’hui la médecine, les scientifiques, les philosophes discutent du statut de l’embryon dans le ventre de la maman. Pour ce qui concerne l’Église et la Bible, l’embryon, le bébé dans le ventre de la maman est déjà une réelle personne, connue et aimée de Dieu, appelée par Dieu ; il est déjà une personne agissante.
Écoutez la profondeur de cette parole du prophète Isaïe : « J’étais encore dans le sein maternel quand le Seigneur m’a appelé ; j’étais encore dans les entrailles de ma mère quand il a prononcé mon nom. » Dès le début de son existence, dès la conception, la personne est déjà appelée par Dieu, appelée non seulement au bonheur, à la vie divine, mais également appelée pour une mission que Dieu seul connaît et qu’il reviendra à la personne de découvrir. « Quand Il a prononcé mon Nom. » Prononcer le nom dans le judaïsme, donner un nom, c’est dire l’identité de la personne et sa mission. Je reviendrai sur la question du prénom plus loin. L’appel à la vie divine, l’appel à une mission que confie Jésus commence dès le sein maternel. Puissent les parents qui attendent un enfant penser à cette réalité : Dieu connaît déjà et a déjà un projet de bonheur pour le bébé dans le sein de sa mère.
Les textes nous montrent également la puissance de la vie in utero au point que la grâce agit déjà, alors que la personne n’est pas encore née. Je reprends deux éléments qui concernent Jean Baptiste. Lorsque Elisabeth, sa maman, recevra la visite de sa cousine Marie, Jean-Baptiste tressaillira dans le sein de sa mère en donnant un petit coup de pied. C’est une réaction à la visite de Marie et de Jésus lui-aussi déjà dans le sein de sa mère. Les enfants font réagir et prophétiser leur maman, alors qu’ils ne sont pas encore nés. Quant à Zacharie, le papa de Jean Baptiste, il va retrouver l’usage de sa parole, et par derrière cela, sa fonction de prêtre du Temple, quand l’enfant recevra le nom que Dieu voulait lui donner. Là aussi, la grâce est pleinement agissante dans le nouveau-né.
Frères et sœurs, ne perdons jamais de vue que le temps de la gestation de l’enfant, le temps de la grossesse pour la maman est évidemment un temps de préparation à l’accueil d’une vie nouvelle, mais c’est aussi un temps qui est aujourd’hui, chez nous, extrêmement médicalisé. N’oublions jamais que Dieu féconde ce temps. Il est bon d’être ouvert à cette réalité. Beaucoup de choses magnifiques peuvent se passer pendant ce temps de maturation.
Beaucoup de choses sont données pendant la gestation. C’est notamment pendant ce temps que Jean-Baptiste reçoit sa mission. Comme je le disais plus haut, la mission de Jean Baptiste est donnée par son prénom. Le prénom dit l’identité et la mission de la personne. Jean, en hébreu Yochanan signifie celui en qui la grâce habite. Toute la mission du Précurseur est contenue dans ce prénom.
Et cette mission se trouve immédiatement confirmée par la guérison de Zacharie, le père de Jean, qui va retrouver l’usage de sa voix. Celui qui se définira comme la voix qui crie dans le désert redonne la parole à son père, avant de devenir le porte-parole ou le support du Verbe de Dieu qu’est son cousin Jésus. Saint-Augustin dans une de ses homélies développe une très belle image qui précise l’intimité existant entre Jean-Baptiste, le Précurseur, et Jésus. Il fait remarquer que Jean Baptiste se définit comme la voix qui est le support de la parole. Et il nous fait remarquer que le Verbe ne peut exister sans la voix qui le porte. En ce sens, Jean Baptiste est à un niveau particulièrement parfait prophète, au sens où il parle au nom de Dieu devant les autres. Il parle au nom de Dieu, pas seulement parce qu’il dit ce que Dieu lui demande de dire, mais parce qu’il est le support du Verbe de Dieu. Les prophètes étaient appelés à exprimer dans leur vie et leur manière de vivre ce qu’ils annonçaient. Là aussi, cela sera d’une manière particulièrement exemplaire le cas de Jean Baptiste qui ne se contentait pas d’appeler à la conversion mais qui vivait lui-même la conversion qu’il prêchait : rites d’ablutions, jeûnes et nourriture frugale, vêtements très simples. Il a à ce point vécu cet appel à la conversion, qu’il a précédé le Christ dans sa mort, dans l’offrande de sa vie pour la Vérité.
La mission de Jean Baptiste qui va être de précéder le Messie, mais aussi de Le désigner et d’inviter à Le suivre, est marquée dans les textes par une rupture et une nouveauté. Nous voyons la rupture dans le choix du prénom. Dans le Judaïsme, on avait 8 jours pour choisir le prénom de l’enfant. Et il était courant de donner aux nouveau-nés le prénom d’un ascendant. C’est d’ailleurs la proposition qui est faite à Zacharie. Or Zacharie va accomplir ce que Dieu lui a demandé, à savoir de donner le prénom de Jean à l’enfant. Il y a ici une rupture dont Dieu est à l’origine ; c’est comme si Dieu reprenait la main sur la tradition des hommes en donnant Lui-même le prénom et la mission de l’enfant. Nous retrouverons la même rupture avec la même nouveauté dans la généalogie de Jésus dans l’Évangile selon saint Mathieu. On va passer de ‘untel engendra untel’ à ‘Joseph l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus.’ Dieu intervient dans l’histoire des hommes et dans leurs relations pour faire advenir une nouveauté qui est celle qu’Il veut accomplir dans notre monde. Jean Baptiste annonce le Messie en qui s’accomplira la Nouvelle Alliance. Si Jésus est la nouvelle alliance, Jean Baptiste est celui qui ouvre la porte.
Frères et sœurs, je souhaiterais terminer cette homélie sur un aspect de la vie spirituelle de Jean Baptiste, que partage d’ailleurs son père Zacharie, qui est la nuit spirituelle. Jean Baptiste a eu une des plus grandes et plus belles missions qui est de révéler la venue du Messie et d’inviter à Le suivre. Pour autant, il ne faut pas croire que sa mission aura été des plus simples. J’ai déjà évoqué la fin de sa vie, son martyr, ou par cohérence à la vérité qu’il a choisi de suivre, Jean Baptiste sera décapité. Mais avant d’être décapité, alors qu’il est emprisonné, Jean Baptiste va connaître une des nuits de la foi les plus redoutables. Presque au terme de sa vie humaine, à quelques heures de sa mort, il se demande s’il n’a pas échoué, s’il n’a pas raté sa mission. ‘Es-tu celui qui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ?’ fera-t-il demander à Jésus par ses disciples. Terrible interrogation qui peut laisser sous-entendre que Jean Baptiste se serait entièrement trompé. Et pourtant il n’en est rien, Jean Baptiste connaît le doute, la remise en question, et tout prophète, tout cousin de Jésus qu’il est, il a besoin lui aussi de recevoir la lumière de Dieu dans ses ténèbres pour le préparer à la Vie. Son père a également vécu une nuit similaire. En ne croyant pas l’annonce de l’Archange Gabriel, il perd l’usage de la parole. Ces 9 mois de mutisme vont être pour lui l’occasion de se purifier intérieurement pour découvrir l’œuvre que Dieu veut accomplir en sa femme et dans son foyer. Cette purification le conduit à obéir en profondeur au projet de Dieu et alors, il va recouvrer l’usage de la parole.
Frères et sœurs, nous aussi nous pouvons connaître des nuits de la foi ou des épreuves dans notre vie de foi. Nous pouvons connaître des doutes qui parfois peuvent même remettre en cause notre orientation de vie chrétienne passée. Le doute, les épreuves font partie du chemin de foi et du chemin de vie des chrétiens. Jean Baptiste et Zacharie nous aident à les vivre. Ils nous invitent à une purification intérieure, à nous tourner vers Dieu pour accueillir sa lumière. L’un et l’autre ont une place dans le projet de Dieu et nous redisent que la conversion à laquelle nous sommes appelés est d’abord une réalité intérieure profonde.
Que la Nativité de Saint Jean Baptiste que nous fêtons aujourd’hui nous dispose en profondeur à découvrir et à assumer la mission à laquelle Dieu nous appelle. Qu’elle nous aide à estimer et à protéger le temps qui précède la nativité d’un enfant en ayant conscience que Dieu agit dans ce temps. Que la Nativité de Saint Jean-Baptiste nous aide à nous ouvrir à la nouveauté que Dieu veut accomplir en chacune de nos vies. Amen !
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